Premier jour du Ramadhan à Montréal. Plus on avançait dans la journée, plus l’envie d’une zlabia, ce fameux gâteau frit au miel, devenait pressante. Pour trouver la meilleure zlabia dans la ville, Il n’y a pas mieux que les réseaux sociaux pour avoir la réponse.

Et pas n’importe quelle zlabia, celle de Boufarik, la variante «de forme longue, en bâtonnets et légèrement épaisse, de couleur jaune-marron», comme la définit savamment Wikipédia. Facebook n’a pas mis beaucoup de temps avant de ramener la bonne réponse.

«La zlabia la plus proche et qui ressemble à 95% à celle de Boufarik est faite par un Boufarikois depuis plusieurs années ici à Montréal. Il se ressource chaque année au bled.

La pâtisserie La Marguerite, près de l’Intermarché, à l’intersection des boulevards Viau et Robert [pas très loin du quartier le Petit Maghreb, NDLR]», poste sur Facebook Abdelkader Kechad, lui aussi originaire de la même ville. Il a fondé en 1997, le premier site web d’information pour les Algériens du Canada, Algeroweb qu’il a rebaptisé, quelques années plus tard, Ksari, du nom du mythique quartier où se fait la zlabia de sa ville d’origine.

Pour les inconditionnels de cette douceur, «la meilleure zlabia est à El Ksari, à côté de la gare de train de Boufarik. L’endroit où tout a démarré avec la famille Aksil», ajoute un autre Boufarikois de Montréal, Abdelkader Kherrat. Direction donc la pâtisserie La Marguerite, au quartier St-Léonard, historiquement peuplé par une majorité d’immigrants italiens de l’après-guerre, longtemps avant l’arrivée des Maghrébins. Il reste moins de 3 heures pour El iftar.

Les deux jeunes vendeuses de La Marguertie n’ont pas le temps de souffler : 500 g de zlabia pour ce client à 15$ (1800 DA) le kilo, 6 pains pour l’autre, 4 qalb ellouz pour cette jeune fille, un pain brioché pour la dame au foulard, des qtayef et des mille-feuilles pour ces deux frères… et la file ne diminue pas en ce dimanche après-midi. Le présentoir regorge aussi de pâtisseries françaises très prisées par la clientèle essentiellement maghrébine, sans oublier le pain au sanoudj (grains de nigelle), au sésame ou aux grains d’anis.

Dans l’arrière-boutique, Mohamed, le zlabia-man, est affairé à préparer la zlabia.

Toute la panoplie du parfait préparateur de zlabia est là, dont le fameux entonnoir. Matériel importé de Boufarik. La semoule, elle-même, vient d’Algérie. Le sirop est fabriqué dans le magasin. «On n’utilise pas la semoule d’ici, car elle est mélangée avec d’autres ingrédients (maïs…)», explique-t-il. En arrivant à Montréal en 1996, il ne se destinait pas à faire de la zlabia. D’ailleurs, il ne savait même pas la préparer, bien qu’il soit originaire de Boufarik -la cité CNEP, pas loin d’El Ksari.

«Tous mes amis et mes voisins en Algérie font de la zlabia. Comme j’avais émigré jeune, à l’âge de 18 ans, je n’ai pas eu le temps d’apprendre à la préparer. Mon aventure a commencé quand j’ai vu quelqu’un à Montréal faire une sorte de zlabia difforme qu’il appelait zlabia de Boufarik ! Sur la blague, j’ai dit à un ami que la prochaine fois que je descends au bled, j’irai apprendre comment la préparer ! J’ai fait un ‘stage’ de trois mois en Algérie pour l’apprendre», explique-t-il, pendant qu’à l’aide de son entonnoir rempli d’une pâte fluide il "dessinait" la zlabia dans l’huile bouillante.

Après l’avoir laissée dorer, il la plonge dans le sirop onctueux à base de sucre préparé auparavant. «Nous préparons la zlabia depuis 15 ans. Mais nous sommes installés dans ce magasin depuis seulement 3 ans. Nous avons commencé à la faire à la maison puis on est passés par la Table fleurie d’Algérie [célèbre pâtisserie algérienne du Petit Maghreb, NDLR], principalement pendant le mois du Ramadan. Mais dans ce magasin, la zlabia est disponible à longueur d’année. En dehors du mois sacré, elle se vend bien les week-ends !», explique Noureddine, le copropriétaire des lieux et originaire de Bouzaréah (Alger).

«Beaucoup d’Algériens viennent s’approvisionner ici. Chaque jour, nous écoulons 200 kg de zla    bia entre la vente au magasin et la distribution. Le week-end, on dépasse les 250 kg», ajoute cet ancien ingénieur en électronique en Algérie. Au même moment, il reçoit un coup de téléphone. Une dame de la ville du Québec passait une commande pour des gâteaux et de la zlabia.

«On la distribue dans les magasins halal et les boulangeries. Notre zlabia est distribuée dans la ville du Québec, à Ottawa et à Kingston (Ontario). On a aussi quelques clients réguliers des Etats-Unis», affirme Noureddine.

https://www.youtube.com/watch?v=KngXleZ8cEc

Zlabia au sirop d’érable ?

A un peu moins de 4 km au sud, le Petit Maghreb. Ici, la terrasse du bar Zoé est ouverte, un client est installé avec une bière. Même chose au bistro chez Albero, un coin de rue plus loin.

Seul signe de Ramadhan, et pas des moindres : les cafés sont vides ou fermés. Il faudra revenir le soir ! Le café Safir, célèbre point de ralliement des fans de l’équipe nationale de football (soccer au Canada) est lui aussi fermé. Des enfants enchaînent les katas dans le dojo situé de l’autre côté de la rue, sous le regard de leur entraîneur (Sensei) Redouane Malek, champion canadien et algérien de karaté koshiki.

Juste à côté, des clients s’alignent à l’intérieur de la boulangerie Castel face à une batterie de grands plateaux de qalb ellouz.

Au coin de la 14e avenue, la pizzeria Pino se transforme chaque Ramadhan, depuis quelques années, en lieu de préparation et de vente de zlabia. Le chef ici est Omar. Il vient de Tizi Ouzou.

«Ma famille à Tizi Ouzou et moi nous préparons la zlabia de depuis 1962. A Montréal, depuis 2012», explique Omar, le zlabia-man, pendant que son collègue allume l’écran installé à l’entrée. C’est le journal télévisé en tamazight sur Canal Algérie !
Quand le journaliste demande si on peut préparer une bonne zlabia de Boufarik avec du sirop d’érable, la réponse de Omar, Mohamed ou Noureddine est sans équivoque : non ! pour la simple raison que le sirop d’érable est trop liquide, alors que la zlabia demande du sirop onctueux.

Il ne faut pas pousser l’intégration trop loin ! «Non on ne peut pas. Le sirop d’érable est léger. Celui que nous fabriquons à base de sucre est plus onctueux, ajoute Noureddine. Cela va revenir trop cher et elle ne se conservera pas bien. Quand le sirop est onctueux, ça se conserve trois jours sans souci. Pour l’anecdote, nous avons des clients qui nous demandent de leur vendre ce sirop pour leurs gâteaux (makrout et autres), chose que nous ne faisons pas malheureusement».

Le temps et les 6248 km de distance entre Montréal et sa ville d’origine finiront certainement par imposer un compromis pour mettre un peu de sirop d’érable dans la zlabia de Boufarik !

http://elwatan.com/hebdo/magazine/ramadhan-a-montreal-jamais-sans-ma-zlabia-de-boufarik-15-06-2017-347302_265.php


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